Résolution des problèmes dans les processus
Il existe une sorte de fatalisme qui fait penser que les événements sont tels qu’ils sont et qu’ils doivent être subis. « C’est comme ça, on n’y peut rien ! Si c’était possible, on l’aurait déjà fait. Ça a toujours été ainsi. » Cette attitude de résignation ne vous sera vraiment pas bénéfique, le danger vient du sentiment que « tout va bien », le progrès, en revanche, a pour source l’inquiétude.
Une fois sorti de ce fatalisme, vous aurez pris conscience qu’il faut systématiquement vous améliorer et de ce fait améliorer les processus de votre entreprise. À partir de là, un nouveau phénomène risque d’apparaître, celui de la profusion de différents problèmes et dysfonctionnements. L’erreur serait alors de surcharger le personnel de votre entreprise en lui demandant de résoudre tous ces dysfonctionnements. Cela entraînerait une baisse de l’efficacité en raison du manque de temps et d’une pression trop importante. Prenez tout de même en compte une certaine nuance, certains problèmes doivent faire l’objet d’actions correctives rapides, car ils présentent pour votre entreprise et/ou des dangers potentiels majeurs pour votre clientèle, la résolution rapide de ces dysfonctionnements dangereux doit donc être confiée au personnel.
Qu’est-ce que la résolution des problèmes ?
Dans le management, la résolution de problèmes est définie comme la mise en œuvre de processus qui réduisent ou éliminent les obstacles qui vous empêcheraient, vous ou d’autres personnels, d’atteindre vos objectifs opérationnels et stratégiques. Notez qu’un problème est une situation qui présente un écart entre les résultats souhaités et les résultats réels. Ainsi, un « vrai » problème n’a généralement pas de résolution immédiate évidente, il faut être patient et consciencieux.
Il y a de nombreuses « écoles » qui discutent de la résolution des problèmes, les méthodes varient selon l’environnement, le nombre d’étapes et les outils utilisés par les différentes entreprises. Dans cet article je vais vous proposer l’une de ces méthodes de résolution des problèmes au sein des processus, mais notez bien qu’il est toujours possible d’y ajouter des étapes ou des outils supplémentaires. Cette méthode n’est pas à utiliser dans tous les cas de figure. De plus, comme tout outil, son appréciation est strictement subjective, un outil n’est jamais indispensable pour bien travailler, il constitue une aide.
Il arrive parfois que certains dysfonctionnements soient difficiles à exprimer. Ils peuvent par exemple prendre la forme de malaises indirects comme des problèmes de communication au sein de l’entreprise. Dans ce cas, vous devrez essayer de définir le problème avec le plus de précisions possible en réalisant une analyse préalable.
La résolution d’un problème demande un délai qui peut varier sur un large spectre : cela peut prendre d’une heure, jusqu’à un mois, voire une année selon sa complexité et parfois selon la quantité d’énergie fournie par le personnel du groupe de travail. Notez toutefois que la méthode de résolution de problèmes demandera une importante rigueur et une grande créativité de la part de l’équipe, elle utilisera des outils diversifiés et adaptés aux différentes étapes de la résolution.
Mise en œuvre d'une méthode de résolution des problèmes
Pour mettre en place cette méthode, l’équipe devra se focaliser uniquement sur la méthode et non pas sur l’utilisation des outils. Je vous présenterai deux méthodes : une méthode générale qui demandera plusieurs séances et une méthode simplifiée qui ne prendra qu’une heure environ.
Méthode générale
Étape 1 : Identifier, définir et formuler les problèmes
L’identification des problèmes peut s’avérer être une tâche complexe. Pour délimiter chaque dysfonctionnement avec précision, un travail d’équipe devra obligatoirement être mis en place. Le groupe devra regrouper les dysfonctionnements qui sont liés pour plus de clarté.
Lors de la première réunion, l’animateur devra demander à chacun quels problèmes sont à résoudre au sein de l’entreprise. Et chaque membre devra répondre en 10-20 minutes, de manière individuelle et par écrit.
Puis, l’animateur devra faire un tour de table pour que chacun puisse présenter un problème de sa liste. Pendant ce temps de parole individuelle, il sera interdit de critiquer ou de juger les problèmes soulever. Cette réunion doit être une phase de créativité et de réflexion, chaque participant doit se sentir libre de communiquer sur n’importe quel dysfonctionnement qu’il soit conséquent ou bien qu’il s’agisse d’un problème de compréhension.
L’animateur devra faire une sorte de rapport des dysfonctionnements relevés, en les reformulant si besoin et en s’assurant de bien les comprendre, il pourra par exemple utiliser l’outil QQOQCCP, la méthode Kepner-Tregoe (est/n’est pas), la carte de l’esprit (Mind mapping), ou encore le diagramme de Pareto.
Étape 2 : Établir la cartographie des activités
Pour résoudre définitivement un problème, il sera nécessaire de cartographier les tâches ou les activités pour ensuite pouvoir les analyser et les améliorer. La formalisation de ces tâches facilitera l’identification des zones à risque et les causes possibles des effets indésirables qui seront observés.
🡪 Outils pouvant être utilisés : Le BPMN (Cf. Article concerné).
Étape 3 : Choisir un problème cible
Deux possibilités s’offrent à vous :
Si vous vous apercevez que vous êtes hésitant et que vous ne savez pas comment vous y mettre, alors vous commencerez par faire ce qui vous plaira le plus, ou par ce qui vous semblera le plus accessible et vous remettrez les tâches complexes ou rebutantes au lendemain. Ainsi vous serez motivés par le travail déjà effectué et la suite vous semblera plus aisée.
Si, au contraire, vous débordez d’efficacité et de motivation, vous classerez les travaux à faire par ordre croissant d’importance puis vous vous attellerez à cette liste en commençant bien entendu par la tâche numéro une. Ce qui ne pourra pas être effectué durant la première journée sera en conséquence de moindre importance.
Pour repérer les problèmes prioritaires, vous pourrez évaluer les risques, sur une échelle de 1 à 4, que pourraient représenter les problèmes en fonction de leur fréquence d’apparition, et de leur gravité. Notez toutefois que ce n’est qu’un conseil, selon le contexte, vous pourrez aussi tenir compte d’autres critères tels que leur complexité, leur impact sur le chiffre d’affaires, etc.
Le choix s'opèrera alors par consensus au sein de l’équipe, vous pourrez opter pour un vote pondéré ou bien l’analyse multicritères. Dans tous les cas, vous ne devrez jamais oublier que la prise de décision doit se faire par le groupe et non par l’outil.
🡪 Outils pouvant être utilisés : Vote pondéré, matrice de pondération.
Étape 4 : Constitution d’un groupe de travail
Une fois le problème cible déterminé, un groupe de travail sera constitué de participants sélectionnés en fonction de leurs aptitudes à résoudre le problème posé, selon leurs compétences et leur métier. Le travail de groupe s’effectuera au travers de réunions d’une à deux heures maximums, de manière hebdomadaire ou bihebdomadaire si besoin. Le groupe ne devra pas dépasser cinq ou six membres.
Étape 5 : Collecter les données
La recherche de points faibles à améliorer commencera par une bonne analyse de la situation qui, elle-même, commencera par la sélection des variables à analyser. Mais quelles variables choisir, lesquelles sont les plus pertinentes ?
Après avoir recensé les variables internes et externes, et décrit les relations via la matrice d’analyse structurelle, vous en identifierez les variables clés grâce à un système de classement issu de la méthode Micmac (Matrice d’Impacts Croisés-Multiplication Appliquée à un classement).
Vous devrez collecter les données quantitatives ou/et qualitatives à partir d’un échantillon. La méthode d’échantillonnage devra être au préalable choisie. Je vous invite à vous renseigner sur les méthodes probabilistes (échantillonnage aléatoire simple ou échantillonnage systématique) et non probabilistes (échantillonnage de commodité ou échantillonnage par quotas).
Une fois ces données collectées, il faudra les analyser afin d’en tirer des conclusions claires pour ensuite prendre les meilleures décisions possible. L’utilisation de plusieurs outils statistiques favorisera une perception plus distincte de la situation comme la variance…
🡪 Outils pouvant être utilisés : Feuilles de relevés, histogrammes, diagramme de Pareto, graphiques, etc.
Étape 6 : Déployer des actions correctives instantanées
Afin de limiter « la casse », vous déploierez des actions correctives instantanées avec un responsable. Vous pouvez comparer ce cas de figure avec celui d’un incendie : le but premier étant d’éteindre l’incendie, puis ce n’est qu’une fois l’incendie éteint que vous en chercherez ses causes de déclenchement pour qu’il ne se reproduise plus dans le futur.
Étape 7 : Identifier les causes profondes du problème
Il y a deux méthodes pour traiter un problème, une bonne et une mauvaise :
La première, la mauvaise, consiste à travailler sur l’effet visible. C’est ce qui est généralement fait dans la précipitation et l’impulsivité : c’est l’action pompier. Vous éteignez le feu. (Ne pas voir de rapport avec la précédente métaphore.) Cependant, il y a un risque que le feu reprenne parce que vous n’aurez pas pris le temps de rechercher les causes du problème ensuite. Vous devrez donc mettre une nouvelle fois en place des actions visant à corriger immédiatement ce nouveau problème, ce qui devrait vous laisser le temps de trouver d’autres solutions plus pérennes.
La deuxième méthode, la bonne, consiste à retrouver là ou les causes potentielles du problème une fois les actions correctives instantanées déployées. Vous pourrez utiliser le diagramme d’Ishikawa que vous adapterez en fonction des catégories de métiers, du contexte, et de la problématique. Cette multiplicité des origines est l’une des difficultés majeures de la résolution de problèmes…
Une fois les causes potentielles identifiées, le groupe déterminera les causes profondes, et sera donc en possession des clés, et des éléments nécessaires à sa résolution.
🡪 Outils pouvant être utilisés : Diagramme d’Ishikawa, 5P et diagramme d’affinité.
Étape 8 : Élaborer le plan d’action comprenant les actions correctives permanentes
En présence de tous les éléments (connaissance du problème, de ses manifestations, de ses causes, de l’origine de ses causes, les conséquences et des objectifs à atteindre), les membres du groupe rechercheront les actions correctives permanentes envisageables. Grâce aux technologies de communication modernes, les expériences personnelles de chacun seront partagées. Ils détermineront les solutions à travers les approches de créativité interne (brainstorming), et externe (veille, benchmarking, réseaux professionnels).
Le groupe étudiera les avantages et les inconvénients des solutions envisagées sur un échantillon en fonction de critères prédéfinis pour cette analyse (contribution aux performances du processus, faisabilité, coût et délai de mise en œuvre, etc.). Il devra définir au préalable, pour chaque action corrective, un objectif et une fréquence de contrôle. Il anticipera les obstacles : quels facteurs de résistance va-t-il rencontrer ? Il déterminera les contrôles à mettre en place pour éviter la réapparition du phénomène (quoi ? qui ? où ? quand ? comment ?).
🡪 La méthode ACIER (des Actions complètes, Identifiées en termes de responsabilité, Échéancées avec les principaux jalons et Réalistes aussi bien en ressources nécessaires qu’en résultats escomptés) aidera à définir un plan d’action qui sera le plus précis et efficace possible.
En fonction des actions correctives définies, vous évaluerez la charge de travail des collaborateurs pour savoir si le déploiement est possible. Puis vous fixerez les priorités des actions correctives via la matrice des priorités :
Quadrant 1 : Actions prioritaires : elles produisent un retour, une amélioration rapidement observable.
Quadrant 2 : Actions à engager dans un deuxième temps pour la dynamique du groupe.
Quadrant 3 : Les gains sont importants, mais pour les obtenir il faut engager des moyens conséquents.
Quadrant 4 : les gains sont minimes et le retour sur investissement lointain.
La planification des actions correctives pourra être faite à travers un diagramme de GANTT permettant ainsi d’optimiser le suivi. Vous nommerez le RACI pour chaque action corrective.
Le plan d’action devra obtenir l’approbation du niveau hiérarchique habilité à prendre la décision formelle. Le plan d’action pourra prendre la forme d’une fiche de propositions de modifications de processus.
🡪 Outils pouvant être utilisés : Loi de Pareto, QQOQCCP, AMDEC, RACI
Étape 9 : Exécution et suivi du plan d’action
Le plan d’action approuvé devra être mis en place par le groupe. Tous les membres participeront concrètement à la réalisation des objectifs. Notez qu’il n’y a pas de méthode ni d’outils dans la réalisation du plan d’action.
La progression sera analysée au cours de réunions périodiques (examen de l’adéquation au besoin du client interne). Cette étape ne devra pas être négligée, car les risques que les choses ne se déroulent pas comme vous l’aviez prévue seront importants. Vous vérifierez si le problème disparaît, en d’autres termes, vous vous demanderez si les objectifs fixés ont été atteints. Si ce n’est pas le cas, vous devrez en définir les raisons, en vous demandant s’il ne faut pas lancer des actions complémentaires. Enfin vous vous demanderez si la solution finale mise en place est efficace. Vous effectuerez une évaluation du risque résiduel du problème afin d’en déterminer sa gravité, sa fréquence ainsi que son mode de détection.
À la suite de cette analyse, l’écart entre le risque résiduel et le risque initial qu’il présentait permettra à la direction, de décider si oui ou non, ils acceptent le risque.
🡪 Outil pouvant être utilisé : AMDEC
Étape 10 : Capitaliser les savoirs acquis pour éviter les erreurs
Pour capitaliser les savoirs acquis afin d’éviter la reproduction des erreurs, vous devrez mettre à jour la documentation processus et les référentiels de bonne pratique. Le pilote du suivi fera un retour d’expérience à l’ensemble du groupe.
🡪 Outils pouvant être utilisés : Documentation processus, REX, GED, Référentiel de bonnes pratiques
Méthode simplifiée
Étape 1 : Constitution du groupe de travail
L’équipe sera réduite et pourra être composée de deux personnes au minimum. Bien entendu, elle pourra compter aussi d’autres personnes si c’est nécessaire.
Étape 2 : Identification des causes
Une séance de discussion et débats d’une dizaine de minutes permettra d’identifier les causes les plus évidentes des dysfonctionnements. En dix minutes, il est fréquent d’en relever six à quinze, ce qui est ici suffisant.
Étape 3 : Classement des causes
Vous choisirez un vote pondéré qui prendra également une dizaine de minutes et qui permettra de classer les causes par ordre d’importance.
Étape 4 : Choix des causes à traiter
Le groupe sélectionnera deux des cinq premières causes identifiées et s’engagera sur des actions correctives pour les éliminer. Dans les méthodes standards, la nécessité de traiter les causes par ordre d’importance obligera à mettre à contribution des personnes plus nombreuses.
Étape 5 : Élaboration du plan d’action
Il vous restera donc environ quarante minutes pour identifier les actions à mettre en œuvre. Le choix des causes abordables permettra de proposer dans ce laps de temps des actions concrètes et faisables. L’expérience montre qu’avec un peu d’entraînement, la durée de réunion d’un groupe varie entre trente et quarante-cinq minutes, c’est-à-dire moins que l’objectif recherché initialement.
Étape 6 : Exécution et suivi du plan d’action
Pour finir, il reste bien entendu à mettre les actions en œuvre, ainsi chaque membre du groupe s’engagera sur cette mise en œuvre. Il est important que ces plans d’action soient centralisés par quelqu’un (cela peut être le responsable qualité par exemple) afin d’en suivre l’avancement de manière régulière.
🡪 Outil pouvant être utilisé : Document d’enregistrement des actions de résolution de problèmes

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